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Les cormets du Beaufortain

Revue N° 29 Page 50

Ayant prévu d'aller passer mes vacances aux Arcs, je me suis vite demandé quels cols j'allais pouvoir ajouter à ma liste. J'ai donc lu attentivement l'article d'André Torremoneil ("Ta gu... la marmotte !") dans la revue de l'an 2000 : il avait gravi le Cormet de Roselend avant de descendre sur Arèches, puis il était passé au Cormet d'Arèches, pour finir dans la vallée de la Tarentaise.

Je comptais effectuer le même parcours, mais à l'envers.
Je quitte les Arcs vers 9 heures et descends vers Landry par Pessey-Nancroix. Je longe ensuite l'Isère via une piste cyclable spécialement aménagée. J'évite ainsi la route nationale.

Commence la grimpée du Cormet d'Arèches. Un point d'eau à Granier, je remplis mon bidon car les points de ravitaillement doivent être rares ensuite. Il est 10h35. Au vu de la carte, beaucoup de routes permettent d'accéder au col dans la partie initiale. Aussi, à la sortie de Granier, j'interroge un homme assis sur son banc.

"C'est la bonne route, encore 10 km et tu y seras" me lance-t-il. Je regarde aussitôt mon compteur et durant tout le reste de l'ascension, je calculerai combien il me reste à faire. L'indication d'un "ancien" sur la distance est fiable.

J'atteins une forêt, légère descente, puis de forts pourcentages s'offrent à moi. Il vaut mieux que ceux-ci figurent sur la partie bitumée du col. Je rattrape un VTT. La discussion s'engage. Il ne connaît pas non plus ce col et ne sait pas s'il ira jusqu'en haut. Je le distance avant d'arriver sur la partie non goudronnée. Si j'en crois mon indicateur de Granier, il me reste 5 km de cailloux à avaler avant d'atteindre le sommet. Je remets le 32x28 pour ne pas patiner.

Depuis Aime, début de l'ascension, je pédale torse nu. A 11h, pour éviter les coups de soleil, j'enfile un tee-shirt. Je dépasse quelques promeneurs, et à 11h30, je décide de m'arrêter pour déjeuner autant que pour me reposer et profiter du paysage. Le repas sera court étant donné qu'à midi, j'arrive au Cormet d'Arèches (2109 m). Je m'y attarde, discute avec des randonneurs, consulte la carte. Il y a plusieurs circuits possibles à faire en VTT par ici.

La descente caillouteuse m'oblige à freiner constamment pendant 3 kilomètres. Arrêts photos près du lac des Fées et en vue du lac de St-Guérin. A proximité de celui-ci, j'aperçois une baraque où je pourrai me désaltérer et remplir mon bidon. Celui-ci est presque vide.

Juste avant d'arriver, une pancarte attire mon attention. Y est indiqué : "Col du Pré 1h30". Est-ce que je tente le coup ? Passer par un sentier muletier pour éviter de descendre sur Arèches. Je vais y réfléchir devant un café à la baraque repérée tout à l'heure. Hélas, ce débit de boisson n'a pas de robinet et ne peut donc remplir mon bidon. Je consomme un verre de lait au lieu d'un café. Cela désaltère davantage.

Je réfléchis : le col du Pré m'avait paru difficile quand je l'avais grimpé depuis Arèches. Il n'y a que 100 m de différence d'altitude entre le col du Pré et le lac de Saint Guérin où je me trouve. J'ai peu de chance de trouver à boire sur le sentier mais quelques alpages existent...
La décision est prise : je vais passer par le sentier. Il est 13h30. La côte du début est goudronnée puis fait place à un chemin R1. Ensuite, une flêche me donne la direction du col du Pré. Je dois descendre de vélo pour emprunter un sentier étroit. On y voit les traces de sabots de chevaux et leurs déjections. Je pousse longtemps ma bécane et entends enfin avec plaisir les bruits de moteurs automobiles. Depuis ce chemin, je voyais Arèches, les lacets qui mènent au col du Pré et une partie du Beaufortin. J'arrive au col du Pré et m'arrête dans le premier café-restaurant "La Pierra Menta" d'où l'on voit le rocher du même nom. Je peux m'abreuver et remplir mon bidon. Enfin !...

Après avoir savouré ma boisson et grignoté barres de céréales et gâteau de riz, je prends des photos du lac de Roselend et de la Pierre Menta puis commence à descendre. Je croise un couple de cyclos italiens. L'homme m'interpelle. Je ne connais pas la langue de Dante mais le langage cycliste est universel : je comprends qu'il veut savoir quelle distance il leur reste à monter. Sans m'arrêter, je lui réponds "deux kilomètres". ll fait la moue.

Je vais flâner autour du lac de Roselend, apprécier le spectacle qui m'est offert et attendre le passage éventuel d'un autre cyclotouriste. J'ôte à nouveau mon tee-shirt. L'heure où les rayons du soleil sont les plus agressifs est passée. C'est donc torse nu que je grimpe les derniers kilomètres du Cormet de Roselend. Je suis plus à l'aise que le matin dans le Cormet d'Arèches. Je n'ai senti les traces de ma course de la veille que lorsque je descendais de vélo, notamment pour m'asseoir et me relever.

Un jeune cycliste arrive au col. Je m'aperçois qu'il n'a presque rien sur lui.
- Tu as de quoi réparer ?
- Non
- Tu as peut-être une petite pompe dans ta poche ?
- Non
- Comment fais-tu si tu as un problème mécanique ou autre ?
- J'ai mon portable !

Et s'il se mettait à pleuvoir ou si la température baissait, ce qui est fréquent en montagne ? Là, pas de réponse. Le portable ne saura pas le recouvrir chaudement. Il faut choisir : rouler allégé comme un coureur ou transporter quelques kilos de plus pour avoir la sécurité et le confort.

Il est 16h30, les vêtements chauds vont enfin servir. La descente du Cormet de Roselend est longue (20 km) et encaissée. Il y aura donc beaucoup d'ombre et peu de soleil, surtout après Les Chapieux. Je porte un vieux casque à boudin dans les descentes : celui-ci occupe peu de place dans les bagages lorsque je grimpe. Dans la partie la plus difficile (virages en épingles à cheveux) de la descente, je dois dépasser successivement quatre voitures.

A 17 heures il fait très chaud lorsque j'arrive à Bourg-St-Maurice. J'ai encore le temps de monter aux Arcs mais, honteusement, je place mon vélo dans le funiculaire. Pour me disculper, je me dis que j'ai fait de gros efforts la veille (il s'agissait d'une compétition) et je veux encore pédaler les jours suivants : l'ami Marc Liaudon (bien connu des 100 cols) m'a donné beaucoup de renseignements sur les cols muletiers de la région.

Pierrick BELBEOCH N°1502

de GUIPAVAS (Finistère)


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