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Cherche, jumeaux, triplés et plus si affinités.

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Au bon vieux temps de nos humanités, comme on disait alors, quand le prof demandait qui pouvait lui citer deux jumeaux célèbres tels que Castor et Pollux ou Romulus et Remus, le cancre de service, en bon redoublant qui attendait la question, s'empressait d'étaler sa science avec Baignol et Farjon, Rivoire et Caret, avant d'écoper de la col-le appropriée pour outrage à l'Antiquité. Eût-il été cyclotouriste qu'il aurait pu aussi bien énumérer quelques couples prestigieux dans un domaine qui nous est cher, la montagne, mais avec un effet comique moins assuré.

Disons tout de suite qu'il ne s'agit pas ici de cols égaux en altitude, bien loin s'en faut parfois, mais de ceux qu'il est souvent tentant de franchir en enfilade, pour ne pas dire dans la foulée quand c'est possible. Qui a fait à l'agonie Lautaret-Galibier, ou l'inverse dans la jubilation ne voudra pas en rester là et aura tôt fait d'en découvrir d'autres, pour peu qu'il aime rêver sur les cartes. Comment pourraient lui échapper la paire Bonette-Restefond, la plus haute de France, ou l'archi-classique Glandon-Croix de Fer ?

Et comme, contrairement au nuage de Tchernobyl, les Alpes ne s'arrêtent pas à nos frontières, il serait navrant de méconnaître ces morceaux de bravoure que sont Umbrail-Stelvio et Valparola-Falzarego, et en moins grandiose les indissociables Eirra-Foscagno si on tient à voir ce qu'un mercantilisme de pacotille a fait de Livigno, un des plus beaux villages alpins.

Pour ne pas être en reste, les Pyrénées nous offrent Puymorens-Envalira et Cabus-Botella, malgré l'infinie tristesse qu'on éprouve à replonger dans ce monstrueux capharnaüm qu'est devenue la Principauté. N'oublions pas Soulor-Aubisque, mais c'est déjà la pointure au-dessous. Et paradoxalement c'est à l'autre bout de l'Espagne qu'il faut aller pour s'adjuger le couple le plus haut perché, Sabinas-Veleta, mais à coup sûr pas le plus beau. Un peu plus loin, c'est la mer, qu'on ne franchira pas, quoiqu'au Maroc...

Ils ne pullulent pas, les triplés, on pouvait s'y attendre, mais il en est deux qui valent le voyage, comme dirait le guide vert d'un célèbre fabricant de pneus dont je tairai le nom. L'enfilade Fuscher Törl – Mittertörl - Hochtor constitue le final de la Gross Glockner Strasse, un des défis majeurs proposés au cyclo-montagnard. Quant au prestigieux trio Grimsel-Furka-Susten, autour du massif d'où divergent les principaux cours d'eau helvétiques, c'est le plus connu des parcours alpins en boucle, succès non usurpé qui commande de s'abstenir en haute saison sous peine d'asphyxie foudroyante.
De quadruplés on ne retiendra qu'un spécimen, moins connu mais aussi classique, sur le circuit ceinturant le groupe de Sella, joyau des Dolomites, à savoir le quatuor Gardena-Sella-Pordoi-Campolungo, également peu fréquentable en saison touristique.

On peut encore faire mieux, diront certains. Et comment ! Ceux qui aiment enfiler les cols comme des perles connaissent bien ces vieilles pistes militaires qui foisonnent sur les frontières franco et austro- italiennes. Combien de fois celle des crêtes de Sestrières n'a t-elle pas eu les honneurs de notre bulletin ? Tout comme l'incroyable marathon autour de la corne des Alpes Maritimes. Et tant d'autres dans les parages de l'Authion, de Briançon, du Brenner ou du Stelvio, émouvants vestiges de temps pas si lointains où l'on expédiait la jeunesse d’Europe s'étriper bêtement en ces lieux voués à la paix et à l'émerveillement. Et il serait injuste de passer sous silence les magnifiques pistes d'alpage du haut Arma accessibles par les cols Ésischie et Valcavera, ou celle qui court sur la longue échine entre Maira et Varaita en passant par le col de Sampeyre, et enfin celle qui égrène entre les vals Camonica et Giudicarie tout un chapelet de cols dont le plus connu est Croce Domini ; il parait même qu'elle a été annexée par le cyclotourisme officiel, à la grande satisfaction de ceux qui prennent la FFCT pour le "Club Med". ou à qui l'aventure fait peur.

Les autres, je les emmènerais volontiers sur les sentiers à la recherche de jumeaux, certes moins illustres que leurs homologues routiers mais combien plus chers à ma mémoire, à commencer par la paire-type Aup Martin-Cavale, en bordure de l'Oisans, vrais jumeaux d'égale altitude et distants d'une enjambée, enfin presque. Hors concours en fait de facilité et surtout de splendeur, le duo des deux Scheidegg passe en revue l'incomparable trilogie de l'Oberland Bernois, Eiger-Mönch-Jungfrau, des moments qui ne s'oublient pas. Et puis au hasard de mes souvenirs, Mallemort-Vallonnet, Diesrut-Greina, Septimer-Forcellina, Naret-Cristallina, Rotja-Velmanya, et pour couronner ce chantant florilège, le très aérien parcours frontalier du refuge Ull de Ter au Puigmal en passant par le col de Neu Creus où neuf petites croix de fer nous rappellent que la montagne n'est pas toujours sympa avec ceux qui l'aiment, et que l'acceptation du risque reste le prix à payer pour avoir droit à l'aventure.

Michel Perrodin

CC n°26


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