Ainsi se nomme le vieux chemin, avec des majuscules bien méritées. La D219, elle aussi, est une rampe austère. Et en plus, sous ce beau ciel bleu d’octobre, il pleut à verse : les premières neiges s’égouttent sur la route Joseph Paganon. On doit à ce sénateur de l’Isère quelques voies audacieuses de l’Oisans datant des années trente. L’une d’elles, en face, monte à l’assaut d’Auris dans les rochers d’Armentier. Mieux vaut ne pas en sortir ! Sous les pieds, la petite plaine bordée par la Romanche endiguée et ses minuscules hameaux bien nets. Au bout, le Clapier où finit le Vénéon et où commence la rampe des Commères. Curieusement, ici, les cyclos bavards finissent par se taire ! Pour moi, tout est prétexte à contempler et souffler tant soit peu. Les tunnels coudés, ruisselants et noirs comme nuits sans lune, obligent à marcher un peu. Que n’ai-je emporté ma lampe ! La route quitte enfin la falaise, grimpe en lacets dans la forêt. Je ne regarde pas ma montre, c’est déprimant ; le compteur m’en raconte assez. Du reste, j’ai le temps, la voiture m’attend à Rochetaillée. Révolue l’époque des départs nocturnes et des longues approches que l’on n’a plus les moyens de supporter (surtout celle de Val Livet). Voici Villard Notre-Dame, aligné sur sa courbe de niveau, enfin au grand soleil dans les dernières couleurs d’automne ! 249 habitants en 1856, 41 aujourd’hui, mais combien vraiment ? Plus de fer, plus de plomb, plus d’or à la Gardette : mine oubliée. Plus de champs non plus : le bel ensoleillement et les bonnes terres avaient rendu jadis ces lieux loin du monde, dignes d’être habités ! Combien d’années les hommes ont-ils vécu en quasi autarcie et sans routes d’accès ? Un panneau indique Villard-Reymond et de fait, les 1500 mètres de goudron sommaire qui montent à l’alpage laissent penser à une liaison routière. Mais non, là-haut, place à la piste ; un chemin facile à flanc de montagne au demeurant très cyclable avec gros pneus par temps sec. Au bout, le GR50 plonge sur Bourg-d’Oisans et ensuite, après un lacet, c’est le col du Solude (1680m) avec ses saules. Rien ne permet vraiment de qualifier ce col de muletier. Il existe cependant, un autre passage de crête plus pédestre et plus haut : Les Maisons du Loup. Celui là, j’aurai dû me l’offrir pour cette troisième traversée en 42 ans ! Mais j’ai préféré la facilité. |
J’ai eu ainsi le temps de contempler les mythiques lacets de l’Alpe-d’Huez que j’ai grimpé un jour avec un 46X24; j’avais vingt ans ! De l’autre côté, il y a de jolies initiations au VTT hors des sentiers battus : Poutran, Maronne, Cluny, Sarenne. Que c’est beau, lumineux ! Pour qui veut «en roter» et se payer un 3000 : le Jandri est là, au dessus des Deux-Alpes. Vous vous époumonerez sous l’œil intéressé des «rigolos» qui se font hisser en téléphérique avec leur machine, mais pendant ce temps, vous, vous franchirez trois cols pour le prix d’un ! Les Gourses en montant, Entre-les-Têtes au retour, à moins que vous ne préfériez descendre le glacier du Mont-de-Lans. Il parait que cela a été déjà accompli, mais, restons sérieux. Villard-Reymond est là, juste en dessous du col. Les Pétarons - qu’ont-ils fait pour se nommer ainsi ? - ne sont plus que 31 (278 en 1826) et doivent tous se trouver dans la vallée en hiver. Je n’ai aperçu personne ! On dégringole sur la Palud par la vieille route remise en service après la suppression du Pont des Oules en 1987. Plus bas, un ultime rappel du passé : la route d’Oules à Les Oisseux où Doulanchons et Drouillets l’ont attendue jusqu’en 1962. Oulles est un bon départ pour rejoindre le Poursollet par le pas de l’Envious… à côté de son vélo ! Ne reste plus qu’à trouver la N91 et le temps présent. C’était mon unique grand col de l’année et j’avais envie d’en parler. Puissé-je avoir convaincu au moins un cyclo des plaines lointaines d’y venir voir. C’est bien plus beau que je ne l’ai écrit ! Marcel Bioud CC 12 |