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Argentine - Chili

Revue N° 27 Page 39

D'Argentine au Chili via le Paso de Sico, altitude : 4079 mètres

Mercredi 20 mai 1998.66 kilomètres :
Olacapato: altitude 4060 m. Une montée de plusieurs jours depuis Salta m'a amené ici avec au passage l'Abra del Acay à 4895 m. Après ce village minier, le paysage est toujours aussi minéral mais le revêtement est un peu meilleur qu'hier. Je délaisse la piste principale du Sico pour la N 37 qui va sur Catua. Piste absolument déserte, remontant un long vallon jusqu'à l'Abra de Arizaro à 4100 m. De beaux rochers rouges égaient la descente. A Catua, village perdu de l'altiplano, pour calmer les gamins agglutinés autour du vélo, il suffit de brandir l'appareil photo.

Km 66. 3900 m d'altitude, je retrouve la piste normale de Sico. Le poste de douane argentin dispose d'une magnifique annexe pour routards en quête de gîte. Douche chaude, radiateur, gazinière, éclairage, tout cela gratuitement en échange de quelques tuyaux donnés à ce douanier qui apprend le français avec des cassettes, proximité du Mondial de football oblige!

Jeudi 21 mai 1998. 34 km :
Le soleil qui ne se lève qu'à 8 heures réchauffe la piste où j'alterne poussage et pédalage. A 10 heures, au km 12, voici la frontière, matérialisée par de grandes pancartes : Paso de la laguna Sico 4079 m. A mon grand désappointement, la piste continue à s'élever. Un autocar, premier véhicule rencontré de la journée, passe en soulevant un imposant nuage de poussière. Au km 20, j'atteins le point le plus haut du jour, un joli col sans nom à 4425 m. Au km 34, à 4320 m, dans une grande montée, se présente la douane chilienne, Avanzada el laco. Il n'est que 14 heures mais comme le prochain lieu habité, Socaire, est distant de 100 km, je demande à me faire héberger. Le chef rechigne, m'indiquant un campement privé à 7 km d'ici, où une voiture pourrait m'emmener. J'insiste, et il accepte de m'héberger, ouf !

Cet après-midi, le chef se les roule tandis que ses deux collègues font le boulot. Peu de contrôles, car en cette saison il passe moins de dix véhicules par jour, mais du nettoyage, de la tambouille et l'entretien du groupe électrogène occupent aisément la journée. J'épluche les cartes murales bien supérieures aux miennes que je complète à la main. Pendant la nuit, le vent fait hurler la tôle ondulée du baraquement, beaucoup plus modeste que son homologue argentin et sans doute la température descend-elle à -20° !
Vendredi 22 mai 1998. 101 km :
Au Chili, on retarde la montre d'une heure. A 8 heures il fait donc grand jour. Une grande ligne brisée infâme m'amène au Cuesta del Laco à 4555 m, point haut de l'étape. La descente passe au campamento el Laco, base technique pour l'achèvement de la ligne électrique à haute tension qui va desservir les mines chiliennes avec du courant argentin issu du gaz bolivien! La piste combine ripio (gravats), alena (sable) et calamina (tôle ondulée), ce qui, ajouté au vent de face, annule tous les effets de la modeste pente.

Laguna Tuyajto : j'abandonne un moment le vélo pour admirer les flamants roses qui font trempette, spectacle prodigieux à cette altitude. Au km 45, une nouvelle bosse avec toujours un grand vent de face. Le conducteur d'une voiture s'arrête à ma hauteur : Tenez, prenez ça !
Et me voilà pourvu, sans rien demander, d'une eau de Seltz et de trois sandwiches !

A 18 heures, j'installe l'équipement de nuit : lampe frontale et dynamo. L'altitude oscille encore longtemps autour de 3900 m, sur une piste en sable, à présent bien cyclable à VTT.
Km 80. Les lumières en contrebas à gauche, que je prends longtemps pour celles de Socaire ne se rapprochent toujours pas. Puis la route se met à plonger et j'entends, ô magie, le bruit d'un de ces torrents canalisés qui descendent des Andes et arrosent les quelques oasis du rebord du désert d'Atacama.

Socaire, sise à 3300 m, surgit au détour d'un virage, au 101éme km. Un petit café-épicerie sympathique m'héberge et je partage le repas avec les patrons. J'apprends ainsi que les lumières lointaines étaient celles de l'usine de lithium, distante de 50 km, à 2300 m d'altitude !

Il sera temps demain de descendre sur le désert d'Atacama et de rallier San Pedro, 90 km au nord d'ici.

Marc LIAUDON N°289

de CRAPONNE (Rhône)


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