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H.R.P.V.

Revue N° 27 Page 32

Qu'est-ce que la HRPV ?
... une admirable symphonie vélocipédique pyrénéenne, serait à mon avis une assez bonne définition de la Haute Route des Pyrénées à Vélo.

La HRPV est destinée à ceux qui aiment la liberté, les grands espaces, la nature, la montagne et l'effort gratuit. Elle est faite pour ceux qui préfèrent contempler la montagne plutôt que de foncer en un minimum d'heures, pour ceux qui - préférant l'autonomie - n'hésitent pas à s'alourdir; pour ceux qui collectionnent les joies simples et pures...

Le prologue
La HRPV démarre d'Hendaye, mais j'avais choisi de partir de Bayonne pour des raisons
...ferroviaires. Je ne le regrette pas : la route des cîmes est un sacré toboggan avec un panorama magnifique sur les collines basques et sur la Rhune. On est tout de suite dans l'ambiance.

La partie Basque
La partie Basque de ce parcours (les 3 premiers tronçons) est une petite merveille : on emprunte des petites routes tortueuses (et parfois aussi rugueuses que des pistes), avec de chaque côté le velouté des prés où se détachent les spirales blanches des troupeaux de moutons, et on monte vers les écailles de dragon qui émergent des sommets moussus.

La montée vers Irati par les cols d'Arthé, d'Irau, de Sourzay, de Bagargui est un des plus beaux souvenirs de cette randonnée. Mais cette montée a été aussi un des moments les plus durs de la randonnée. Peut être parce que c'était le début ? En tout cas il ne faut pas sous-estimer la difficulté des montagnes basques, d'autant plus trompeuses que les altitudes portées sur la carte ne sont pas impressionnantes.

L'étape suivante de Larrau à la Pierre St Martin est également magnifique avec l'ascension du port de Larrau et la remontée de la vallée espagnole de Belagua où des chevaux en semi-liberté gambadent sur la route. Par contre le final dans les cirques de lapiaz du col de la Pierre-Saint-Martin fut assez laborieux. Et quand j'arrive au sommet du col, je vois un type au milieu de la route qui s'agite : il me semble qu'il me fait signe de m'arrêter. Comme je continue, il change de gesticulations : maintenant il veut que j'accélère, je me rapproche et j'entends maintenant ce qu'il me crie :
"mines! minas ! dépêchez vous çà va sauter !". Le temps que je réalise et j'entends une explosion, je me retourne : soixante dix mètres derrière moi la route est jonchée de débris de rochers ! Un beau souvenir !

D'autres et plus agréables souvenirs : les étapes. Agréables mais curieuses : j'ai -fort bien-dormi à Ainhoa, dans un gîte dominant le cimetière, avec l'horloge du clocher qui sonnait toutes les heures et toutes les demi-heures. A Esterençuby j'ai dîné et passé la nuit dans un hôtel de police, avec des flics des plus sympathiques! A la Pierre-Saint-Martin, station désolée dans son cirque de pierres grises avec ses pylônes de tire-fesses, ses bâtisses genre HLM aux volets clos, tout était fermé (le 15 juin!). J'ai finalement trouvé refuge chez Jean Hourticq, personnage étonnant et chaleureux qui tient le bien nommé refuge Jeandel, et qui - en plus - cuisine, comme un vrai chef, la garbure. Tiens bon Jean! Et que l'administration ne t'oblige pas une nouvelle fois à passer une semaine au fond d'un gouffre, pour garder table et gîte ouvert aux randonneurs de passage.

Un petit regret : j'ai fait la descente sur Osse en Aspe dans la bruine.

La Marie-Blanque
La montée est sévère, mentionnait le guide. Je confirme : cette Marie-Blanque mérite bien sa réputation de Marie-Salope : ce fut le pire moment de la randonnée! Pourquoi : je n'en sais rien ! C'était la seule montée de la journée, et ni la longueur ni la pente ne suffisent à expliquer la sévérité de cette ascension. Peut être à cause des longues portions droites, qui sapent le moral, et du soleil qui tape sur toute la montée ?

Aubisque et Tourmalet
Deux très belles étapes. Ascensions longues mais régulières (et à l'ombre le matin). Le cirque du Soulor est de toute beauté. Le bistrot du col de l'Aubisque possède une photo représentant Robic passant le col pendant le Tour de France 1948. En comparant l'état de la route d'alors avec le billard qu'elle est devenue, je me dis qu'il faudrait rajouter quelques pour-cent à la montée actuelle pour retrouver les conditions de l'époque. Faisons nous vraiment les mêmes cols que les cyclistes d'autrefois ?

En tout cas on est récompensé de ses efforts par les descentes ; avec les traversées des jolis villages d'Aucun, d'Arcizans, et Ste Marie de Campan (j'ai -bien sûr- été jeter un coup d'oeil sur la forge où Christophe répara sa fourche, lors du Tour de France1913).
L'Aspin est un très beau col, qui se monte bien et qui offre au sommet un beau paysage, très reposant avec les troupeaux de vaches en liberté (ce qui m'a rappelé les montagnes de mon Jura natal).

Un méchant Portillon vers l'Espagne Arreau est une étape agréable. La suite aussi, sauf les derniers km du Portillon. Là aussi je ne comprends pas ce qui fait la difficulté de ce col, mais elle est réelle. Par ailleurs on manque de vue dans la montée et le sommet est vraiment moche (et sans aucun panneau).
Comme la route entre Bossost et Vielha est facile, j'ai fait étape à Vielha et je m'en félicite. On a plus de choix pour se loger et on peut attaquer directement le lendemain.

Le col de la Bonaigua (2072m)
Assez facile, mais un peu décevant côté paysage. Esterri de Aneu est un village sympathique et vivant. Llavorsi par contre n'a aucun intérêt. J'ai continué jusqu'à Alins, où s'achève la route goudronnée et j'ai trouvé un bon hôtel, et un accueil montagnard. Sur la minuscule place d'Alins il y avait bal (bal de tarde et bal de noche!). Cela n'a pas troublé mon sommeil !

Sur les pistes de contrebande : le col de Cabus (2300 m)
Une trouvaille! Il est vrai que c'est un des grands moments de la randonnée. Quand on traverse ce village quasi médiéval de Tor (où les naturels ont le regard aussi torve que leurs chiens sont vicieux) et qu'on s'engage sur cette piste incertaine, montante et cabossée, il faut vraiment avoir une foi aveugle dans le guide des éditions Rando !

Mais quand au sommet la Guardia Civil vous ouvre obligeamment et avec un grand sourire la herse qu'elle a mise en travers de la piste et qu'on découvre tout le panorama des vallées andorranes, alors là -oui- on est vraiment récompensé de ses efforts !

A noter : sur cette piste la Guardia Civil est très présente (à cause sans doute des multiples trafics avec Andorre), et les habitants de la haute vallée du rio Noguera n'aiment pas trop les touristes (voir les pancartes : "Vall privad : fincas") ; il est vrai qu'il y passe beaucoup de 4x4 et de motos tout terrain.

Vers Font Romeu
C'est à partir d'Andorre seulement qu'on peut envisager d'allonger les étapes. La montée vers le Port d'Envalira est longue mais sans problème (le trafic était encore faible en juin), mais les paysages de cette Suisse hispanique m'ont déçu.

Sur la route de Font-Romeu, j'ai fait étape, à la sortie d'Angoustrine, à l'auberge "Calxandera", installée dans une ferme du XVIII ème, restaurée avec infiniment de goût par Serge et Marie-Christine Souquet. Là, j'avoue que j'ai été tenté de prolonger mon séjour d'une journée : pour faire quelques cols supplémentaires, visiter l'enclave espagnole de Llivia ou se décontracter dans les bains sulfureux de Llio ou de Dorres.

Le Conflent et le Vallespir
Deux belles étapes avec de merveilleuses petites routes absolument désertes, deux villes charmantes : Prades et surtout Céret avec ses eaux vives qui courent le long des rues et ses platanes gigantesques.

Les pistes de Las Illas, et du col de l'Ouillat
Deux beaux cols (col de la Brousse et de l'Ouillat). Cols tout confort : ombre et fontaines...
Je recommande la fontaine Ste Marie dans la montée du col de l'Ouillat qui offre au randonneur un véritable ermitage, avec bancs et table de pierre !

Par contre sur les pistes au dessus de Las Illas je me suis perdu. Après le col du Figuier, sur une mauvaise piste montante, j'ai pris à droite et j'ai rencontré la Guardia Civil !!! (au col de Manrella). Je suis finalement descendu sur La Vajol, Aguiana et La Jonquera. Il y a visiblement des PB de marquage du GR 10 dans tout ce secteur. Quant à la piste des Albères, elle offre finalement peu de points de vue sur la plaine du Roussillon et sur la mer.

La descente sur Sorrède n'est pas très confortable : la pente est forte, la piste est très cassante : pierres et par endroits de véritables marches.

Le final (la Méditerranée)
J'avais fait étape au gîte du col de l'Ouillat, dans l'espoir d'avoir un lever de soleil sur le Canigou d'un côté et sur la mer de l'autre.

Ce fut raté : les lointains étaient brumeux, comme ils l'ont été durant pratiquement toute la randonnée, mais c'est le seul reproche que je puisse faire au temps qui s'est maintenu au
beau durant cette période ( du 13 au 26 juin 1998).

Pour le dernier jour j'ai pris la route du balcon de Madeloc qui domine la côte entre Collioure et Banyuls et qui est vraiment superbe, mais attention à la chaleur qui s'ajoute au dénivellé!
Et voilà la fin du voyage : Banyuls, la Méditerranée et ses "golfes clairs".

Comme j'avais deux jours devant moi avant de reprendre le train à Perpignan, j'en ai profité, entre deux baignades, pour aller voir le soleil se lever sur Cerbère par une petite route en balcon passant par les cols de Gran Bau et de la Creu et pour visiter, au mas de la Roume, le charmant musée Maillol.

En chiffres :
HRPV = 959 km en 13 jours (70 km/jour - 5 h 30 de roulage par jour - Vm = 14,5 km/h)
= 22.360 m de dénivelé (1.600 m/jour)
= 60 cols (dont 5 > 2000m)

Le Guide : "la Haute Route des Pyrénées à Vélo", Georges Véron, Pierre Roques, Danielle Maze, Rando-Editions, BP 24 - 65420 IBOS (Tarbes)

Jean-René CARRÉ N°3735

de PARIS (Seine)


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