PRÉLIMINAIRE : occasion et but de cet article : quand j'ai formé le projet d'augmenter ma collection de cols en "faisant" ceux d'Autriche - après avoir fait en 5 ans une partie de ceux de Suisse, dont 15 sur 19 des cols goudronnés de plus de 2.000, j'ai commencé par chercher une carte évidemment. Et je n'ai trouvé que la "Michelin 426" ; or elle n'est qu'au 1/400.000, elle ne pouvait donc pas me fournir les précisions des 4 cartes de Suisse au 1/200.000 (rien touché pour cette "pub"). J'ai multiplié mes recherches, en vain. Je me suis donc tourné vers... Chauvot, mais il n'a pas pu non plus me fournir les renseignements désirés. Alors je suis parti en me disant : "c'est les vacances, rien ne te presse, on avisera sur place en fonction des difficultés découvertes au fur et à mesure du déroulement de la randonnée. Tant pis si certains principes en prennent un coup ! " La randonnée terminée, j'ai pensé que l'expérience faite pourrait rendre service à d'autres cyclos en mal d'Autriche. Et j'ai demandé l'avis de notre président qui m'a donné le feu vert. Depuis 1974, ce ne sera jamais que la 2e fois que je fournis un papier pour le bulletin de notre confrérie ; je n'aime pas écrire. Si je le fais, c'est pour rendre un de ces services que nous pourrions nous rendre plus souvent entre nous. Si un membre de la corporation veut aller en Autriche avec tout le plaisir de la découverte, qu'il ne me lise pas plus loin. Attention : je me limite uniquement à une présentation "TOPOGRAPHIQUE" des cols que j'ai franchis pour que les amis, sachent, en très gros, ce qui les attend ; je ne raconte pas ma randonnée, encore moins mes impressions. (pas de muletier). LA CARTE CI-DESSUS ? Je ne suis pas non plus photographe. Mais quand je présente - rarement - une randonnée au cours de laquelle j'ai quand même pris des photos, je dessine vaguement sur un papier "les grandes lignes" du voyage. Ce n'est pas "folichon", je suis le premier à le reconnaître, mais comme j'explique (car je suis meilleur parleur), ça passe. Ne pouvant vous fournir de vive voix les explications nécessaires, je conseille aux lecteurs intéressés de se procurer une carte de la double région Voralberg-Tyrol et de suivre là-dessus. Ne cherchez évidemment pas de proportion, pas d'échelle. EXPLICATIONS : les "ronds", ce sont les principales villes, les "deux tirets", les cols... VILLES : BR : Bregenz - B L : Bludenz - LQ : Landeq - R : Reute - I N : Innsbruck - W : Warth (petit village, mais croisement routier important) COLS : BO : Bodèle 1148 ; HCH : Hochtanbergpass 1679 ; FL : Flexenpass 1773 ; FRN : Fernpass 1679 ; G : Gaitchpass 1093 ; HL : Holzleitnersattel 1126 ; R : Reschenpass 1507 ; FK : Furkajoch 1760 (pas fait) et enfin BLH : le Bielerhohe 2040 et l'Arlberg (AR) :1793. ALLONS-Y ! Les indications données ne peuvent pas avoir un caractère subjectif ; elles n'ont comme but que d'esquisser un aperçu des difficultés qui attendent le cyclo. Ensuite, chacun se débrouille avec ce qu'il est. Les aspects plus "subjectifs" sont ceux-ci : 65 ans, toutes randonnées en solitaire, vélo chargé pour pouvoir "vivre" de 10 à 15 jours, nécessaire répartition de l'effort, retouches dans l'organisation de la randonnée en fonction des imprévus (intempéries, pannes, etc...) Ce qui veut dire qu'un col m'aurait peut-être paru plus facile si je l'avais gravi à un autre moment). LE BODE LE : je ne m'attend pas à lui sur mon itinéraire ; je le découvre en traversant Dorbnir, et parce que je cherchais à éviter l'encombrée route de Bludenz ; ce qui explique que je n'ai pas fait le Furkajoch ; mais j'en avais assez d'être "accompagné" depuis des dizaines de kms, le long du lac de Constance. C'est un "VRAI " : 7 kms à 10 % de moyenne, sans désemparer, dans le sens Ouest-Est ; aucun faux plat, pas de répit pour souffler. De l'autre côté, il n'est pas facile non plus, mais il y a des baisses de pourcentage qui l'humanisent (8 kms). L'HOCHTANBERGPASS : dur, dur.., dans le sens Ouest-Est ; j'explique. C'est quand je l'ai refait dans l'autre sens quelques jours après que j'ai vu un panneau indicateur qui m'avait échappé dans la montée : il indiquait une "descente" de 5 kms à 14 % ! Ce que j'avais donc monté, en mettant humblement pied à terre à certains moments. Car il convient de préciser qu'avant d'arriver au pied de ces 5 derniers kilomètres, il avait fallu "s'en envoyer" quelques autres, qui, pour n'être pas du 14 %, vous "saquaient" les pattes avant de les aborder. En tout cas, ça m'a rassuré après coup sur ma forme du moment ! Il y a d'abord les 25 kms d'approche dans la verdoyante vallée que j'ai appelée de "l'Au", car tous les noms de villages portent cette syllabe, celle de la rivière ? et puis vous vous hissez beaucoup plus péniblement au village de Schrôcken, enfin vous abordez les fameux 5 km, qui, à mon avis, sont bien un ou deux de plus. A la halte de Nessleg, vous croyez que c'en est fini de votre tourment ; non, ça repart de plus belle. Vous pouvez atteindre le col dans le sens Est-Ouest par deux routes, de toutes façons plus faciles. Elles ont un final commun, à partir de Warth : 5 kms 500 : une formalité. Si vous arrivez à Warth depuis Lech, et donc le Flexenpass, aucun problème : ça monte, ça descend, ça tournicote ; pas de gros effort. Par contre, si vous venez de Reutte, vous aurez remonté tranquillement la vallée de la Lech, pendant 50 kms quand même ! et puis, un peu après Steeg, vous avez 8 à 10 kms d'une montée plus sèche, mais enfin assez normale dans ce genre de randonnée, oscillant entre 5 & 8 %, au bout de laquelle vous arrivez à Warth. LE GAITCHPASS : je le situe là, parce qu'il vous permet de rompre la monotonie de la longue remontée de la Lech ; à Welssenbach, vous la quittez, et en 4 kms vous avez le plaisir, assez facilement acquis, du 4 - 6 %, d'augmenter votre capital "cols" d'une unité ; tant qu'à passer si près, autant en profiter ! Notez que, 24 kms plus loin sur la même route, vous avez l'Oberjochpass, à 1180 m. ; si le coeur vous en dit... A moi, il ne m'a pas dit. Revenons à Warth... L'ARLBERG et LE FLEXENPASS : Si vous prenez ce dernier de Warth, pas de problème ; en atteindre les 1773 m n'est rien puisqu'on ne descend que très peu depuis l'Hochtanberg. Venant de l'autre côté, c'est-à-dire depuis la vallée qui commence à Bludenz, sans être trop dur, c'est autre chose. Il y a un long "tronc commun" avec la montée vers l'Arlberg (Klostertal). 15 à 20 kms sans problème ; puisqu'on va vers un col, il s'agit de ces longues approches à 2-4 % ; puis quelques coups de rein successifs pour vous hisser d'abord à Klosterle, puis à Langen (où commencent les tunnels ferroviaire et routier qui passent sous l'Arlberg pour rejoindre directement St-Anton), enfin à Stuben. A cet endroit, vous voyez sur votre gauche les galeries qui parsèment la montée du Flexen. Un large lacet, assez pentu, et les deux routes se séparent. En 4 kms exigeants, vous atteignez le Flexen. Revenons au lacet au-dessus de Stuben : de là, ce sont 5 kms de la même exigence qui vous amènent à l'Arlberg. Du côté de St-Anton je n'ai fait que le descendre (par mauvais temps d'ailleurs), j'en ai gardé le souvenir d'une descente très, très rapide, donc la montée doit être en conséquence ! 5 à 6 kms qui ne doivent pas être faciles, faciles (520 m de dénivelée, faites le compte vous-même). Et vous aurez fait avant une partie de manivelles de 30 kms depuis Landeq en légère déclivité ascendante. |
LE RESCHENPASS : Ça dépend de votre itinéraire et de vos projets ; de Landeq, vous pouvez revenir soit en Suisse soit en Italie (les frontières sont très proches). C'est dans cette dernière hypothèse que vous passerez le Reschenpass à la frontière. Vallée très riante, où le cyclo se perd un peu entre les routes réservées aux seules automobiles et celles qui traversent des villages aussi agréables les uns que les autres ; un défilé un peu pentu à proximité des deux frontières ; après un nouvel effort, vous débouchez dans les prés skiables de la station de Nauders, et un dernier pour arriver au col et en Italie. Dans ce dernier pays, vous êtes dans le Haut-Adige qui vous amène au pied du STELVIO, à moins que vous ne préfériez passer en Suisse par l'OFFENPASS qui rejoint l'Engaddine... mais revenons en Autriche et même revenons à Bludenz. LE BIELERHOHE : de Bludenz, pendant 30 kms, vous gambadez dans les magnifiques prairies du Montafon, domaine skiable de réputation internationale, dont la capitale est Schruns. En tant que cyclo, aucun problème jusqu'à Partenen (450 m de dénivelé sur 30 bornes). Brutalement, changement de décor : vous entrez (vous ne pouvez pas ne pas le savoir) dans le domaine de la "Silvrettastrasse", un beau tapis roulant quant au revêtement, un sacré morceau à avaler quand on n'a pas d'autre moteur que celui (un bel ensemble) que nous a donné la nature. Deux parties sensiblement égales quant au kilométrage : avant et après le Vermuntstausee. J'en profite pour vous prévenir que ce sera le seul endroit, sur ces 16 kms pénibles, où vous trouverez de quoi vous restaurez si vous n'avez rien sur vous. De Partenen donc, vous attaquez le fond de vallée en cirque, d'abord à droite, puis vous passez à gauche, et vous revenez à droite, pour finir, avant de déboucher sur le Vermuntstausee, carrément au-dessus de ce tout ce que vous venez de gravir. Vous pouvez contempler votre "exploit" : trois fois un paquet de lacets dont on se souvient toute sa vie (je ne sais plus combien, m'a dit le cantonnier, mais il était sûr de lui ! moi aussi !) Mais quand vous débouchez sur le Vermuntstausee, vous êtes déjà amplement récompensé (du moins c'est mon goût ; je n'ai pas fait beaucoup d'effusion dans ce papier ; permettez celle-là). Est-ce la fatigue de cette fin d'après-midi ? Est-ce la décompression ? (je ne vais plus qu'à avoir à me laisser glisser jusqu'à Innsbruck - du moins je me l'imagine - et je ne peux pas ne pas arriver maintenant au sommet du col) ? Mais j'ai encore trouvé durs les derniers kilomètres pour atteindre les 2.040 m du Bielerhôhe ; pas de comparaison avec ce qui précède, mais j'en ai encore bavé. Je n'insiste pas sur cette ultime difficulté, car je la crois assez subjective. Il faudrait avoir un autre avis de connaisseur. Toujours est-il quand même que d'une part il ne faut pas se croire au bout de ses peines au Vermunststausee (ça, c'est sûr), d'autre part on peine dans un tel décor que ça atténue considérablement l'aspect "pensum" de cet effort. On en est d'autant plus heureux de franchir ce "plus de 2000". C'est un effort d'un tout autre genre qui vous est demandé si vous "le" montez à partir de Landeq. C'est 40 kms qu'il vous faut mouliner pour rencontrer la première difficulté sérieuse ; et vous aurez diminué la côte à monter de 750 m ; il vous restera 450 mètres répartis sur 9 gentils kilomètres pour arriver au but. Un petit coup de rein par-ci, par-là... Vous voyez : c'est autre chose. Vous ne vous ennuierez pas, car ici encore, les petits villages autrichiens sont agréables à contempler. Et puis, ne faites pas comme moi : ne ratez pas l'occasion d'augmenter votre collection du "Zeinisjoch" ses 1842 m sont à portée de pédales ; un tout petit détour, assez raide quand même. L'HOLZLEITNERSATTEL & LE FERNPASS : Si de Landeq vous ne voulez pas aller à Innsbrück, après une petite grimpette jusqu'à Imst, vous avez une petite route (pas indiquée sur ma photo) qui vous amène au pied du Fernpass, laissant l'Holzleitnersattel de côté (mais pourquoi ne pas aller à Innsbruck ?). De cette ville, vous finissez par passer l'Holzleitnersattel presque sans vous en apercevoir, en ce sens que vous roulez en allant de paliers en faux plats (et réciproquement) pendant pas de kilomètres, et puis c'est en sortant d'un bois que vous réalisez que vous avez enfin passé le col (pas indiqué) parce que vous vous trouvez en face de trois magnifiques lacets serpentant dans de vertes prairies. Donc un col aux deux faces bien différentes comme le Bielerhôhe, mais sans comparaison pour ce qui concerne l'effort à fournir. A propos du Fernpass, je me permets ma 2e effusion d'état d'âme : il est à faire pour sa... beauté ! Rien de grandiose ; nous ne sommes pas au-dessus de 2.000 ; à peine au-dessus de 1.200. Mais précisément, comme fraîcheur (un peu trop même le jour où je l'ai fait, vous voyez ce que je veux dire, mais ça n'a pas diminué mon admiration), comme variétés de verts, comme coups d'oeil (forêts, petits lacs avec petites îles verdoyantes, très belles maisons...), un mirage ! La paix ? Un peu moins peut-être, encore que je ne suis pas trop mal tombé ce jour-là. Pour le cyclo, effort soutenu mais agréable. Dans le genre "pastoral en montagne", on ne doit pas faire beaucoup mieux. Je serais ennuyé que vous -y alliez sur ces indications et que vous reveniez déçus ; mais je ne peux pas ne pas vous livrer mes impressions ! Quand je pense à la joie que j'ai eue avec ce col. JE TERMINE : je ne sais pas comment d'ailleurs... Je ne veux pas m'embarquer sur mes impressions d'ensemble lors de cette randonnée qui, de Strasbourg à Mulhouse, m'a apporté beaucoup de joie et de souvenirs. Cet été, je compte aller au-delà d'Innsbruck, objectif : le Grossglockner et ses 2575 m, mais surtout tout ce qu'il y a autour d'un tel périple. Je précise tout de suite pour certains que, si je bénéficie d'une bonne santé, je ne m'astreins à rien de particulier pour entreprendre ce genre de randonnées ; quand le jour possible arrive, je pars et je m'adapte continuellement en fonction de tous les paramètres qui peuvent venir du bonhomme, des intempéries, du vélo, voire des nouvelles venant de France et obligeant à faire demi-tour ! Au plan physique, ça n'a rien de surhumain... et je reste quand même dans des pays "occidentaux". D'autres l'ont fait avant moi ; je souhaite que beaucoup goûtent aux joies de ce genre de cyclotourisme ; mais à chacun les siennes, c'est le principal. François MUDRY |