Ce matin-là, pourtant, la journée ne semblait pas vouloir bien commencer. Au moment de monter sur mon vélo, il me semble que quelque chose l'empêche de rouler normalement. Un court examen : je découvre ma roue arrière passablement voilée à cause d'un rayon cassé. Bizarre, c'est la première fois que ça m'arrive (eh oui !). Après avoir amoureusement enroulé mon rayon autour de son voisin et un peu dévoilé la jante (j'ai une clé à rayons dans la voiture), me voilà enfin parti. Mais où se trouve Marie-France ? Mon épouse ne s'est pas retournée en partant, mais bof, je vais bien la retrouver un peu plus loin. En effet, au bout d'un kilomètre, je la vois qui revient dans ma direction et qui s'arrête d'un air penaud. Partie tranquillement, elle a réussi à se tromper de route... Il faut dire qu'au Pont d'Aubenas le carrefour est d'importance. Se rendant compte de son erreur et de sa solitude, elle est revenue sur ses pas pour s'engager sur le bon chemin. Au bout de quelques minutes, ne me trouvant pas, elle avait décidé de rejoindre le parking. Enfin, après de mutuelles explications, nous voilà partis en direction de Vals-les-Bains et de Mezilhac. J'avais repéré dans le Chauvot, tout à fait par hasard, le col de Vals (402 m) situé dans sa banlieue immédiate - 2,5 km - mais non porté sur la carte Michelin. Je vais donc le franchir en donnant rendez-vous à Marie-France à Entraigues, où elle va voir si Jean Ferrat chante devant sa mairie. Mon Dieu, que la montagne est belle en Ardèche ! Après mon escapade, nous nous retrouvons pour grimper tranquillement (très) les nombreux kilomètres qui nous séparent de Mézilhac. Il faut dire que mon épouse n'est pas inscrite au club des Cent Cols, qu'elle peine toujours un peu en côte, mais que, de toute façon, le vélo sur le plat, elle ne trouve pas ça très drôle. Avec l'aide d'un bon vent du sud, nous arrivons tout de même au sommet à midi, où je découvre avec plaisir qu'un panneau indique " col de Mézilhac 1119 m ", alors que la Michelin l'ignorait totalement. Cela fera donc un col de plus au tableau, c'est même mon troisième pour 1998, et nous ne sommes que le 9 septembre ! Je dois vous dire que, bien qu'habitant près de Grenoble, à la retraite depuis déjà près de deux ans, inscrit au club depuis 20 ans passés, je ne totalise guère plus de 400 cols, alors que certains font ça dans l'année, les pauvres ... Et pourtant, dès que j'en sens un à ma portée, j'en frétille d'avance ! Casse-croûte dans l'herbe au sommet. Tiens, voilà le jeune étranger que nous avons croisé hier dans les gorges de l'Ardèche, avec sa petite remorque et son gros barda ; il se dirige vers le Gerbier de Joncs. Quelle santé, ces étrangers! Le vent du sud est toujours présent, même tellement présent que parfois il nous fait traverser la route contre notre gré. Mais bien vite nous passons au nord de la ligne de crête et finalement il ne nous gênera pas trop pour le retour. |
Rapidement, nous nous trouvons devant un panorama extraordinaire et nous nous arrêtons pour le détailler. La vue est très bonne aujourd'hui, et derrière la vallée du Rhône, le regard distingue très bien une partie des Alpes et des Préalpes, depuis le Ventoux jusqu'au Mont Blanc, avec les grands sommets enneigés. Merveilleux ! A nos pieds déjà c'est un enchantement. Du mauve de la bruyère aux verts et roux des landes, champs et forêts, au gris des rocailles et au bleu du ciel soutenu par quelques petits nuages blancs, toute la palette des tons y passe. De quoi oublier très vite la longueur de la montée du matin. D'ailleurs la route descend et va descendre encore sur 20 km. Nous passons le col des quatreVios (1149 m), puis le col de la Fayolle (887 m), et au point côté 825 m sur la carte Michelin, un panneau indique " col de Sarrasset ". Merveilleux, voilà encore un col en cadeau-souvenir. Bientôt nous rejoignons la N 104, je laisse Marie-France escalader le col de l'Escrinet (787 m) à 1 km environ, et je continue à descendre pour franchir le col de l'Arénier (682 m) 1 km plus bas. Bizarrement, ce col ne franchit rien du tout, mais si Robert Chauvot est d'accord, alors moi aussi ! A l'Escrinet, nous faisons le point. Marie-France n'est pas du tout dans le rouge après cette longue descente, alors rentrer à Aubenas par la route N 104 avec cette circulation n'est pas très engageant. Nous décidons donc de mettre tout à gauche, le cap et la chaîne du vélo, et nous attaquons la colline par le CV. Montées et descentes se succèdent. A un moment, le passage me fait penser à un col : en effet, le soir, le Chauvot m'apprend que nous avons passé le Coulet de la Soulière (834 m). Peu après Freycinet, nous voici au col du Bonus - pardon - de Bénas (795 m), connu même par la Michelin. Court demi-tour, et il nous reste à nous laisser couler, par un magnifique vallon, vers Darbes et Lussas, puis à passer la colline pour rejoindre la N 104 à St-Privat et le parking du Pont d'Aubenas. Superbe sortie conjugale, pas très éprouvante malgré ses 90 km, et très intéressante pour moi qui n'avais pas encore franchi très souvent neuf cols dans la même journée. Et encore, si j'avais pris la peine d'étudier sérieusement le Chauvot !.. Promis, on reviendra ! Et ma roue, dans tout ça ? à peine plus voilée que ce matin, mais avec mon poids léger, je ne fais guère souffrir la mécanique. Quand même, il va falloir réparer ça. Raymond FAURE N°1466 de ST-MARTIN-d'URIAGE (Isère) |